Les coins
de rue et les visages gris de la nuit observaient cet homme courant à sa perte.
Le pavé encore noirci par le froid de la nuit le guide à l’aveugle dans le cœur
de ses propres méandres. Angoisse et terreur accompagnent, main dans la main,
celui qui s’est perdu en lui-même. La faune nocturne jetait un regard amusé à
ce nouveau venu de nulle part. Errant parmi eux, Frédéric ne sait plus quoi
faire, déroute totale dans un univers aux allures bien rangées qu’il venait
tout juste de perdre.
La respiration
haletante, le cœur battant à tout rompre, l’esprit dans la brume de son
incompréhension, Frédéric n’en pouvait plus de courir dans la nuit, seuls
quelques mots ne cessaient de s’afficher dans sa tête : « Fuir, fuir
la raison, fuir sans raison ».
La tête lui
tournait dans tous les sens. La vague de panique qui l’a envahi dès son arrivée
dans son appartement ne lui a pas permis de réfléchir rationnellement à la
suite de ce qui allait arriver. Mais qu’aurait-il bien pu faire de plus? Tout
était en miettes chez lui, comme sa vie d’ailleurs l’avait été. De plus, de
l’arrivée des gardiens de la paix sonnait davantage la rapidité d’action que la
réflexion.
Ses jambes
n’en pouvaient plus, lui qui n’avait jamais été un athlète payait le prix de sa
sédentarité de fonctionnaire. Toutefois, le temps n’était pas à l’apitoiement,
mais à la recherche d’un plan de secours, le plan B, le plan inexistant.
S’appuyant
contre un mur dans une des rues qu’il n’avait jamais même arpentées depuis son
vivant, il reprit son souffle à l’abri d’un bac à poubelles. Sa respiration
toujours ardue se muta en crise d’angoisse rendant sa récupération quasi
impossible.
La rage de
l’impuissance se gorgeait à chacune de ses inspirations qui lui brûlaient les
poumons. Lui qui avait toujours eu cette vie sans histoire, se voyait désormais
sous une nouvelle appellation de fugitif fautif accusé à tort.
S’adossant
au mur de briques orné de graffitis grivois, la bile montante se fraya un
chemin vers la porte de sortie inondant les alentours de son refuge temporaire
improvisé. La tête lui tournait de plus en plus. C’est dans cet état d’esprit
que le réel s’était dissout dans un brouillard qui l’envahissait rendant noir
tout ce qui l’entourait. Bref, il perdit connaissance.
Délire d’un
songe venu tout droit le torturer dans toute sa vulnérabilité, il voit toute sa
vie qui défile dans un monde qui n’est plus sien, qui ne l’a jamais été
d’ailleurs. Un imposteur joue son rôle et jouit d’une vie comblée sous le
couvert d’une vie familiale épanouie, un cottage simple et un travail moins
prenant.
Son corps
se mut par les soubresauts du dégoût que lui engendrait cette vision forçant
son réveil brutal. Comme le monde onirique n’est jamais bien loin du réel, il
sentit la douleur des assauts répétés d’un ravisseur. Il fut roué de nombreux
coups de pied brisant ainsi toutes les résistances qu’il aurait pu offrir si la
vie ne lui avait pas retiré l’espoir de vivre. Ivre de douleur, il assiste,
impuissant, à la fuite de son assaillant avec à son bord les dernières
ressources financières qu’il avait prises avant de partir.
Voici le commentaire de Jean-Luc, posté sur ce chapitre avant que les limbes informatiques ne l'avalent :
RépondreSupprimer"Entre "le félon fourbe" et "l'autre", c'est bien le premier qui répond le mieux à son nom :-))) Si "l'autre" avait brillamment posé les bases d'une grande histoire... la félonie du fourbe n'apporte très modestement qu'une petite idée nouvelle, bien confortablement installée au détour de propos de promenade... petit malin, va :-)))
Bien à vous et au plaisir de vous lire!"